On parle de « personne handicapée vieillissante » quand la situation de handicap, quelle qu’en soit la nature ou la cause, a précédé le vieillissement. Ce handicap n’est donc pas la conséquence du vieillissement. Mais le vieillissement peut provoquer une aggravation
dudit handicap.
Sujet peu envisagé ni renseigné quand les personnes handicapées connaissaient une mortalité infantile ou à l’âge adulte très forte, il devient beaucoup plus présent depuis les années 90 à la faveur des gains importants d’espérance de vie des personnes handicapées. Un Rapport de l’IGAS de 2013 (L’avancée en âge des personnes handicapées par Patrick Gohet) soulignait que, sur ce sujet, les connaissances n’avaient pas encore suffisamment évolué.
Pourtant, René Lenoir, secrétaire d’Etat à l’action sociale, soulignait déjà de manière prémonitoire en 1976 et avec un langage propre à l’époque, que « les débiles profonds mouraient presque tous à l’adolescence. Ils atteignent maintenant l’âge mûr et nous aurons dans dix
ou quinze ans, de grands handicapés du troisième âge ».
En effet, tous les pays développés ont constaté la même évolution : dans les années 30, une personne trisomique à la naissance avait une espérance de vie de moins de 10 ans. Elle est passée à 55 ans dans les années 1990 et il est admis désormais que 70 % des personnes
trisomiques 21 vivront au-delà de 50 ans. Les courbes de survie des personnes handicapées épousent même des profils de mortalité qui convergent progressivement vers les courbes d’espérance de vie de la population générale. Ce vieillissement peut être précoce, caractérisé par un décalage entre l’âge auquel apparaissent les manifestations du vieillissement et l’âge attendu normalement pour ces manifestations. C’est la raison pour laquelle aucune borne d’âge ne peut être retenue. Là aussi, le concept de fragilité prend tout son sens. Ce vieillissement est également très différencié, selon la nature du handicap.
Les familles de personnes handicapées, aidants naturels parfois depuis l’enfance, sont confrontées à leur propre vieillissement, et soumises à l’angoisse du « qui après moi ? ». Les associations et gestionnaires d’établissements et services pointent les besoins spécifiques liées au vieillissement et les difficultés à y répondre. Les gestionnaires d’EHPAD sont parfois amenées à accueillir des résidents handicapés mais là aussi leurs structures ne sont pas nécessairement adaptées (formation du personnel, planning d’activités…).
Ce focus sur les personnes handicapées vieillissantes poursuit un triple objectif : souligner l’ampleur probable des besoins à couvrir, la nécessité de mieux les connaitre et la suggestion d’inclure cette problématique dans la réflexion sur le grand âge.
Source : LES PERSONNES ÂGEES EN 2030
État de santé, démographie, revenus, territoires, modes de vie : portrait-robot de la génération qui vient
Auteurs : Jérôme GUEDJ – Luc BROUSSY – Anna KUHN LAFONT